samedi 31 décembre 2011

VOTE

Récemment le juge des affaires familiales a statué sur la demande de mise en tutelle de mon beau-père.

Et nous avons reçu la notification, et lu, glacés, les termes des mesures arrêtées…
Bien sûr nous l’avions demandé, bien sûr sans doute était-ce inéluctable, mais l’écriture est bien ce qu’un vain peuple et nous en pensons, une trace symbolique puissante, et voir écrite l’expression de cette dépossession d’identité nous fut un grand choc.
Certes déjà, voir l’homme qu’il est devenu, l’entreprenant, bravache, et souriant macho, fier de sa précision comptable et de son sens des affaires est déjà terrible ….
Mais l’énoncé juridiquement précis de ses non droits nous serra le cœur ...
Mais plus bizarrement encore ce qui accrocha mon esprit et mon émotion fut la suppression de son droit de vote.
En prenant les choses à la légère, nous aurions pu nous dire que c’est tant mieux, tant fut grande de tous temps notre mésentente concernant nos convictions politiques et sociales, si grande qu’elle ne trouva jamais à s’exprimer…
Mais j’ai pris conscience à cette occasion que le droit de vote est pour moi n’est jamais quelque chose que je puisse prendre à la légère.

Ce n’est pas que je sois hélas (?) une très grande militante politique…
Ce n’est pas non plus l’empreinte profonde des engagements politiques militants de mes deux grands pères, l’un « dégradé » pour avoir fait grève en 36, l’autre frappé d’AVC brutal au moment de Vichy.
J’ai plutôt hérité du tempérament « conciliateur» de mon père et du réformisme militant et passionné de ma mère.

Non ! je crois que la marque profonde, parce qu’elle est affective et touche à la conception de la personne humaine, plus qu’à la seule politique, c’est la remarque réitérée de ma mère , à chaque élection
"Quand je pense disait-elle que j’ai passé tant d’années de ma vie sans pouvoir voter, quand je voyais les hommes y aller ça me rendait enragée…"
Et pour une fois elles se trouvaient totalement d’accord ma grand mère et elle !!!

En relisant à cette occasion quelques articles sur l’histoire du vote des femmes, je vois qu’il fut effectivement parfois écarté par des partis dits de gauche pour se prévenir des influences néfastes que les femmes dans leur ignorance ( native ???) auraient pu subir , éternelles mineures, entravant ainsi la Marche du char du Progrès !!!

Une mesure de protection en somme ….une mesure « tutélaire », oui ! Mais pour qui ?


En ces temps incertains où se débat ce droit, ne pourrait-on pas être tenté de pendre de si salutaires mesures de bien public et de protéger (ou de se protéger) de votants virtuellement dangereux…. ?
En ces temps incertains où se débat ce droit, où certains le réclament, où d’autres militent pour son exercice, où d’autres refusent de l’exercer….
Parfois s’effrite mon optimisme désespéré, parfois je vacille, je suis « comme une truie qui doute »* le doute destructeur s’infiltre sur les légitimités des uns ou des autres à bénéficier de nos suffrages, leur capacité à assurer quelque chose d’un peu mieux, à la responsabilité qu’il y a à voter pour eux….

Je ne sais pas si je l’exercerai à bon droit ce droit…

MAIS, ce dont je ne doute pas, c’est que je ne veux pas en être protégée, je veux dire exclue !!!!!



* citation empruntée à Claude DUNETON

vendredi 30 décembre 2011

Noël païen...

Noël m’apparaît toujours  (ou encore ?)  avec l’ estompe du temps, comme nimbé des images brumeuses de mes Noëls d’enfance , brumes de la vallée de l’Adour , pâles matins de l’hiver, sentier dans la forêt de pins où nous cherchons mon père et moi un beau petit pin à couper (munis de l’autorisation en bonne et due forme du maire de la commune !!!), quête odorante et attentive : trop gros,trop clair, trop pâle, oui ! bien vert !....
Bricolage d’installation dont la moindre merveille n’était pas pour moi, celui de la baladeuse électrique que Payou recouvrait de papier transparent rouge que plus tard il réussit à doubler grâce à une grosse douille de porcelaine blanche d’une ampoule bleue..!

Rose et bleu couleurs du ciel,
"C’est le soir des belles choses,
"Rose et bleu couleurs du ciel,
"C’est Noël, Noël, Noël !!!


Car si Mérotte dédaignait ces bricolages d’ installations et de crèche , elle nous offrait le répertoire naïf, mais parfois subtil, des chants que son passé d’"Institutrice Laïque" avait constitué. Si elle les avait choisis profanes, aux premiers temps les plus rudes de la guerre de la Laïque contre la Privée, elle céda parfois, pour ceux qu’elle estimait les plus beaux, à l’émerveillement de la Nativité :

« Entre Le Bœuf et l’Ane gris
"Dort, dort, dort le petit « fis »
"Mille anges divins
"Mille séraphins volent à l’entour
"De ce grand dieu d’Amour ! »

Ainsi, quoique mécréant, Payou nous fabriqua-t-il une crèche.
Ainsi autorisèrent- ils ma foi naïve dans la Naissance de ce tout petit enfant qui devait changer le Monde…Il y a donc dans ma boîte à souvenirs, des visites de crèches avec ma grand mère, des messes de minuit, pleines de cantiques et de bougies, de retours à pied vers le « souper » « médianoche » au chocolat chaud , et l’ouverture des cadeaux attendus, jamais très nombreux , parfois ludiques puis souvent « utiles » , toujours nimbés de joie fiévreuse …

Puis mon Noël a perdu la foi en la divinité de l’Enfant-Roi
Mais est demeurée pour moi l’enchantement de la Naissance !!!! Qui il est vrai change tout !!!!
Emmêlé avec l’attente païenne de l’espoir du jour qui se lève et de la terre qui brisera le gel…

Je n’ai jamais renoncé à « faire l’Arbre" ! désormais sapin coupé de jardinerie , plus régulier, plus foncé, mais (peut-être !!!) plus odorant que mes beaux pins d’enfance…


La naissance de nos enfants, notre fille, nos petites filles, ont rebâti les mystères du Père Noël, ravivé l’espoir d’un renouveau du monde…
J’apporte désormais de plus en plus d’application à « Faire l’Arbre et la Crèche » et Michel, qui n’a jamais connu enfant le moindre arbre ni la moindre guirlande, dans l’appartement de ses parents s’est mis il y a quelques années à m’assister dans cette délicate entreprise.

...De plus en plus d’application, peut-être parce que, j’en ai parfois la crainte,  la ferveur à le faire s'est estompée!

Heureusement ELLES sont là !!!

Attentives aux rites familiaux, participant désormais à la décoration de l’arbre, à la construction de la crèche…attendant l’heure du Père Noël avec d’autant plus d’impatience et de foi que nul n’y croit plus !!!
Consacrant à la composition du paysage de la crèche, leur goût des histoires et des personnages..


Histoires rêvées...

Exigeant musique et, maintenant en jouant…

Dansant à la folie , la mère et la grand mère, et même la grand tatie n’étant pas les dernières, pendant que les pères font les DJ et photographe, puis le Père Noël , bruyant, toquant rudement à la porte, agitant sa clochette….donnant raison à ceux qui toujours honorent son existence!!!!

Reprise par l’excitation conviviale de cette joyeuse soirée, avec peut-être « un petit si mineur » en tête…je prends un délicieux mais ambigu plaisir à ce moment qui nous réunit encore une fois …
Surtout pour leur joie à elles, leur bonheur émerveillé du rituel qui se renouvelle ….

Et je me dis, petit à petit Noël redevient pour nous ce qu’il est au fond : quelque chose de profondément altruiste….
Mais où le bonheur des autres nous fait bonheur…

Loin Loin du terrible Noël du lendemain où, à la maison de retraite de mes très vieux beaux parents, les aides soignantes, coiffées de bonnets rouges de cotillon , afficheront la joie des « ravis de la crèche», en circulant entre les visages détruits, les regards vides ,ou parfois tragiquement implorants, de tous nos pauvres petits vieux !!!


Mais où sont nos Noëls d’Antan, nos Noëls d'enfants ?



dimanche 18 décembre 2011

FACEBOOK, Réseau social qui vous relie à des amis..ou La Tour de Babel ?

Je devrais bien être la dernière à dénigrer facebook, moi qui à tout moment viens à ma lucarne et comme la reine de Blanche-Neige, me penche sur mon miroir magique pour le consulter :
« Miroir , Facebook magique , dis-moi dis-moi qui es là, qui ou qui…… »

Il me semble parfois retourner bien en arrière du temps où adolescents nous avions une « bande » et un lieu de rencontre où nous allions voir, dès que nous en avions l’instant propice , « s’il y avait quelqu’un de la bande et qui… ».

Je trouve parfois à ce lieu de rencontre quelque chose qui ressemble à la fête de mon pays de Dax, un rassemblement où se mêlent indifféremment des gens d’âge et d’horizons sociaux différents, qui échangent sur tout et sur rien, et y goûtent le plaisir d’un partage communautaire…
..A un hall de gare en hiver, un lieu de pas perdus, de lumière, et de chaleur, où passent et se croisent nombre de gens divers qui, attendant pour prendre un train ou qu’arrive un de leurs proches, transforment parfois ce temps d’attente en une parenthèse inattendue de communication humaine , brève mais intense…
...A une cantine de travail où l’on croise des gens à la fois familiers et pas réellement proches, mais qui de manière inattendue, vous font parfois de surprenantes confidences comme un précieux instant d’intimité ..

Mais néanmoins- nonobstant- et- mal –gré- que j’en aie, je me demande parfois si ce miroir n’est pas qu’un miroir aux alouettes où l’on se perd en s’éblouissant …
...Un vaste caravansérail où tout un chacun circule, apporte ses tissages bariolés et les parfums subtils de son artisanat, les expose avec complaisance, mais ne prend guère le temps de regarder, tâter, déplier, soupeser, les produits offerts par les autres à son appréciation.
...Un vernissage géant où l’on s’invite, se presse, goûte petits fours et vin mousseux, échange des jugements distingués … mais où l’on oublie de regarder les tableaux exposés !
...Une vaste cour où chacun va parmi ses propres amis et vient seulement publier ses conversations privées.
...Où l’abondance des amis et des propos, des musiques ne sont que l’écume des choses ….
...Un lieu où se parlent nombre de belles langues …qu’on ne comprend que peu…

Comme dirait Madame Pernelle :
« Ce sont propos oisifs , chansons et fariboles…
« C’est véritablement la tour de Babylone*
« Car chacun y babille et tout au long de l’aune …
*note du petit classique Bordas- ed 1968 !: « La tour de Babel »nom hébreu de Babylone.

Que m’arrive-til ? Suis-je en train de m’aigrir ? (avec apostrophe hélas !!!LOL !)
La sinistre marâtre de Blanche Neige pour commencer, et pour finir Madame Pernelle, la mère vieux jeu, réac, et en un mot « mal vieillissante » d’Orgon dans le Tartuffe ….

Non ! non !!!!
Pas « pour finir », car « pour finir » je vais vous faire un aveu : ce mirage de la communication j’y suis accro finalement, pour son animation si vaine soit-elle, pour sa diversité si illusoire soit-elle, pour ses échanges pour factices qu’ils puissent être parfois..

Ce mirage de la communication...

...Et surtout parce que j’avoue qu’on y fait parfois des RENCONTRES qui pour être virtuelles et extra-ordinaires (ou parce que virtuelles et étrangères à notre sphère), ne nous en offrent pas moins des moments de communication vraie et l’occasion d’ un véritable partage de goûts et de valeurs …

ET CELLES- LA, VALENT BIEN……………………. !!!

jeudi 15 décembre 2011

Gianni Coscia, Gianluigi Trovesi, Frères Jacques: Chemins de traverse

Une fois encore c’est l’accordéon qui nous attire sur un chemin de découverte…
Et sans doute le hasard « objectif » ?qui a guidé les pas de Michel à musarder dans le rayon du centre culturel du Parvis en quête d’une cueillette musicale…

Disque répertorié Classic music

Classique musique !!!!
Et la merveille, c’est bien sûr l’accordéon qu’on connaît bien, car les deux compères nous avaient déjà ravis en « célébrant » Pinocchio (In cerca di cibo)et Kurt Weill (round about Weill)
Mais aujourd’hui, ce qui m’enchante particulièrement, c’est la superbe clarinette de Trovesi !!!
Superbe clarinette, et qui me semble convenir à la fantaisie pétillante et légère de Frère Jacques…
Et réciproquement Offenbach convient à merveille aussi à la fantaisie décalée des deux musiciens !!!

A ce petit elfe malicieux et délié Gianni Coscia, et à ce petit clown ébouriffé …si talentueux et virtuose, Gianluigi Trovesi .Leurs duos se répondent ou se croisent avec finesse , alegria, et parfois une si tendre mélancolie , que lorsqu’on sort d’en rire on en pleurerait bien…d’émotion !

Musique classique ???
Je regrette pour ma part que le livret, anglais et italien, ne me livre pas les clés de leur lecture d’Offenbach, ni non plus l’analyse d’Umberto Eco, car leur interprétation des thèmes de Jacques et les créations qu’ils leur inspirent me paraissent chargées de culture et d’une riche connaissance d’Offenbach…
Qu’il s’agisse de la structure de la plupart des compositions : interprétation d’un thème, puis une création qu’il leur inspire :
 -Sei italiano ?
Trovesi/Coccia
-No !...je suis Brésilien !
Offenbach/la vie parisienne

Il s’agit en les écoutant de suivre une fois encore comme nous aimons à le faire un chemin de traverse, qu’ils nous frayent gaiment …

Et nous …" traversons"  de l’accordéon aux clarinettes, d’ Offenbach à Trovesi, et de Trovesi à Offenbach :je m’en retourne réécouter la Barcarole … et puis je réécoute leur barcarole et c’est délicieux, car le thème attendu se fait deviner, entrevoir, puis disparaît, revient comme en filigrane et se perd….
Et la barcarole nous mène à La vie est belle que je n’avais regardé que partiellement tant le thème m’ en était insoutenable...

Et les deux amis nous ramènent à Kurt Weill , à Brecht et à Mack the Knife !!!
Et à Louis Amstrong !


Et c’est ce qui j’aime dans nos divagations musicales, c’est que n’étant à rien astreints, nous allons notre chemin sinueux, et, comme d’un cheveu d’ange brillant ou du fil aérien d’une toile d’araignée, nous en suivons le trajet ténu…

Et nous découvrons ou redécouvrons des trésors inconnus ou oubliés …


mercredi 7 décembre 2011

Le new meeting quartet : LUSITANIA

Michel a raconté la découverte de Lusitania :


Quant à moi, avant tout, ce sont les mélodies qui me séduisent dans ce disque...
Bien sûr La Javanaise, bien sûr Bebê….de si beaux thèmes interprété dans un style très personnel…
Mais aussi et surtout les thèmes originaux, de Xavier Triviaux, sources pour moi d'une véritable émotion, qui tient à je ne sais quoi, à la répétition du thème, un peu « ostinata », que la batterie souligne avec délicatesse…à une tonalité un peu mineure, qui chante une sorte de mélancolie tendre et douce... à la longueur assez conséquente des morceaux qui permettent le développement du chant , sa reprise, sa variation…

« La toute petite valse » m’enchante comme une romance…
Une valse dicrète et humble, qui ne veut pas prendre trop de place…
Mais qui s’impose pourtant dans ma tête et ma mémoire !

«Peace with me… ”
Une ballade où la mélodie est jouée à tour de rôle parle piano et l’accordéon, qui se croisent et se recroisent…pour faire la paix…

« Harlem –Manhattan »
Une course poursuite haletante , dans les rues de New York : un accordéoniste poursuivi


« Lusitania” aussi…
Un point culminant d’Europe d’où l’on peut voir, sentir , et entendre le Brésil…

Et merci à ces petits mots pour la musique, que nous offre le livret. Certes la musique n’a pas besoin de mots sans doute, mais moi j’aime ces mots qui ouvrent, comme le font les titres, des horizons de rêveries multiples…

J’aime le rôle imparti aux instruments, la présence constante , évidente, mais légère de la batterie, que la contrebasse vient souligner avec gravité, le dialogue accordéon- piano, leurs jeux de plans, les chorus du piano …j’aime beaucoup ce piano…

J’ai bien conscience que Tarija et Bebê sont peut-être les plus « jazzy » , mais ceux que je préfère, ce sont les compositions qui éveillent cette émotion, faite d’harmonie et de mélancolie douce, un soupçon déchirante… Quiet Song, … La Toute Petite,… Peace with me…
Mes préférées sont celles qui éveillent cette émotion, que les mots écrits cristallisent encore…


Une musique belle et touchante …qu’on souhaite entendre en live !!!
Où ? Quand ?
A la grâce des Muses ...
et des Hasards musicaux !!!!   Ceux qu’on provoque !!!

A défaut, écoutez les sur Myspace, c'est déjà bien...:

lundi 5 décembre 2011

A Filetta, Paolo Fresu, Daniele di Bonaventura, Marciac...


J’avais déjà écrit la belle découverte qu’avait été pour nous la musique de Mistico Mediterraneo…lors de sa sortie…



...Découvert en suivant la trompette superbe de Paolo Fresu.





L’Astrada- la destinée en occitan !!!- nous a permis de vivre cette écoute en direct…
Sept voix envoûtantes , remarquablement tissées en une polyphonie complexe , à laquelle s’enlacent la trompette de Paolo F…et le bandonéon de Daniele di Bonaventura

Des rencontres, des textes, une inspiration, qui prouvent que la musique traditionnelle, vivace, enracinée à sa terre comme la bruyère de mon pays, « ne vit que si elle est en mouvement … »
Une musique inclassable, ni jazz, ni classique, ni ethnique.
De la Musique, en somme…Tour à tour solennelle, enlevée, swinguée, déchirante.
...Qui se souvient des langues de la méditerranée, le corse, l’italien, le latin.
...Et que sur ces bords, résonnèrent la lyre d’Orphée, les incantations de la « Sybille au visage latin », la déclamation de la Tragédie, la scansion de Virgile, les chœurs de l’Eglise Romaine, puis ...
les polyphonies corses…

C’est une musique « à mystères », une musique mystique, que servent remarquablement la trompette de Paolo Fresu et le bandonéon de Daniele di Bonaventura
Car cette musique a rencontré aujourd’hui le jazz, avec la très belle trompette de Paolo Fresu ,  les traditions de la musique classique et la modernité contemporaine avec le remarquable bandonéon de Daniele di Bonaventura.

Hier soir nous avons donc eu la chance trop rare et l’extrême plaisir d’écouter à nouveau Paolo Fresu, sa trompette mélodieuse autant que virtuose, d’une déchirante douceur, une trompette que j’aime entre toutes… (celles que je connais !!!)



Mais la découverte de la soirée fut pour nous le bandonéon de Daniele di Bonaventura. Un son remarquable, puissant et nuancé , qui sert les voix, et est servi par elles et dialogue avec la trompette de Paolo…

Ecoutez-le dans Liberata


Un bandonéon que désormais nous rêverons et tâcherons de suivre, à chaque occasion possible sur nos chemins de musique...




Allez-voir les photos de Michel :


samedi 3 décembre 2011

La sagesse du repassage


Parfois quand il fait beau, j’aime laver tout le linge que ma mère appelait « de maison » et le faire sécher à même l’herbe du jardin …Bien sûr parfois les chats du voisin , attirés, se glissent dessous pour s’en faire un abri quiet et odorant de lessive…on en est quitte pour le relaver …

Le linge en garde une odeur d’herbe et d’air que je trouve délicieuse et qui s’exhale à la tiédeur du repassage…

J’aime assez repasser, pour cette odeur que dégage le linge quand on y passe le fer, le calme de cette tâche manuelle et facile, la liberté laissée à la pensée de divaguer, le plaisir du résultat visible du travail accompli….

En revanche, quand le ramassage du linge sec produit son entassement de draps torchons et autres …que j’installe ma table de travail, je ne peux me déprendre d’un certain stress de la tâche à achever , une tendance à trier les différents pièces à faire, les compliquées, et les plus simples, et à les compter…et recompter.


Ainsi en était-il des paquets de copies puis les piles de « mémoires » que produisaient mes élèves, la même tentation de les compter et recompter au fur et à mesure qu’avançait le travail…Ce comptage pour moi n’allégeait pas le souci …au contraire…

En fait , ce que m’a appris le repassage- ou plutôt ce qu’il pourrait nous apprendre – c’est qu’il ne faut pas compter. C’est l’anticiper qui grossit la tâche.

Il faut faire une pièce , puis une autre , les plier, et les entasser en piles assorties qui augmentent peu à peu , les regarder grandir avec satisfaction, sans penser… , sans évaluer ce qui reste à faire…Une chose après l’autre , et vient le projet achevé , la tâche faite …

J’ai souvent remarqué dans mon travail la vertu, quand on peut s’y contraindre, de cette discipline : ne pas envisager trop loin, faire au fur et à mesure la tâche qu’on s’est fixée… et, selon un comportement qui me construit parfois (mais parfois seulement !!!!) un soupçon de sagesse, le comportement « on verra après… »




Mais foin de la sagesse, bien sûr, et c’est un peu enrageant, tout ce linge frais repassé, toutes ces piles parfaites , il faut ensuite les ranger dans les armoires… !!!

lundi 28 novembre 2011

La Femme de César.

Danièle Mitterrand est morte...
 A ma connaissance, celle qui fut tant d’années, et depuis qu’elle avait vingt ans, la « femme de César » réussit à garder son individualité, tant politique, qu’intellectuelle et sociale…
Je l’en admire, comme d’ailleurs j’admire l’indépendance d’esprit qui fut la sienne dans tous les domaines, la conduite de sa vie en particulier...

Quelques temps avant, la première dame de France actuelle, autrefois star reconnue de la chanson, a mis au monde une petite fille avec, malgré le siège obstiné des photographes à proximité de la clinique d’accouchement, une discrétion que je respecte, quelle que soit par ailleurs mon opinion sur la politique de son amoureux …

Et ces évènements réactivent …..une question qui titille mon féminisme, une question que je me pose de manière récurrente : qu’est-ce, « à vivre », qu'être la femme de César ?
De Sissi Impératrice à Carla Bruni, en passant par Bibiche Pompidou, Bernadette Chirac ou Danièle Mitterrand, et tant d’autres …quand devient-on (seulement ?) « la femme de… » ?

Je fais un effort pour supposer, même si j’ai du mal au fond à admettre que le problème est réversible, que même chose sans doute advient au mari d’Angela Merckel ou à l’époux de Simone Weil ???

Je repense alors à cette découverte d’une jolie notation de Richard Galliano dans le livret de New York Tango que j’ai rouvert récemment pour en réécouter la musique

Perle
Perle…ma petite Muse…
ma Compagne…ma Femme.

….J’en fus émue et repensai à cette occasion, à ce morceau très beau et infiniment touchant écrit par lui à la mémoire de Piazzolla, Laura et Astor, dans lequel il associe indissolublement les deux, parce qu’ils étaient pour son amitié un couple …

Vu l’admiration que nous portons à Richard et à sa musique, on est tenté de penser: «Quelle chance de vivre à l’ombre bénéfique de sa musique, et de vivre par procuration le bonheur d’un tel talent artistique ….d’y modestement contribuer… »….
Un très délicieux petit film de Danièle Thomson « Fauteuil d’orchestre » qui met en scène un pianiste reconnu, incarné avec talent par Albert Dupontel, et la femme de ce pianiste, exprime avec, à mon avis, une grande délicatesse, ce rapport ambigu…

Le film me semble d’ailleurs, plus généralement, à travers les personnages de la caissière du théâtre ou du collectionneur de tableaux, élargir la question au rapport que les amateurs d’art, ont avec ceux qui ont… le Talent !!! Qui leur permettent de vivre en les côtoyant, la création esthétique par procuration.

Et sans doute le rapport avec ceux qui ont…le Pouvoir! n’est-il pas moins ambigu… !


Et je me demande parfois si c’est si simple, si facile, si heureux sans partage ou sans ombre, d’être la femme de César ?

… ou d’ailleurs le fils ou la fille de César ?

mercredi 23 novembre 2011

La Mixtuur de Tuur Florizoone.

La mixture de Tuur Florizoone est un sacré élixir !


AVEC :
Les mélodies mélodieuses dont il sait le secret, qui sont de celles qu’on garde en tête et dans le cœur, Queskia… Kwa heri………

...Les vocals de Tutu Pudane ,c’est la voix d’un peuple en quête de son identité* , appel touchant, mélancolique et toutefois joyeux avec les chœurs de Nabindibo………Surgissent des images de ciels africains et d’horizons sans limites …

Ajoutons les grains de sel indispensables, les ingredients de l’amitié et de la complicité musicale Michel Massot, Marine Horbaczewski

Des rythmes qui me parlent des Gnawas de ma jeunesse et de la sentimentale musique de Out of Africa dont je fus durablement touchée…

Trompette , double bass , percussions, et balafon pour un somptueux mélange qui clame la richesse du métissage en musique …et pour la civilisation !…

Le tout enveloppé de l’odeur délicieuse de la cuisine de maman Greet…



Mixtuur is a tribute to mixed people…by mixed musiciens….

Cette mixture est un philtre d’amitié généreuse et de bonheur musical !!!Ecoutez!!!







*La thématique aborde le métissage (‘mixus’ en latin) et ses différentes perceptions. Si aujourd’hui en Belgique, le métissage est plutôt bien accueilli, il a longtemps été synonyme de souffrance pour des enfants ‘oubliés’ de tous. Voici donc un concert qui sert le propos en faisant la part belle aux meilleurs musiciens belges et africains pour un métissage de couleurs sonores des plus intéressants.
A côté des virtuoses Michel Massot (tuba), Nicolas Thys à (basse), Laurent Blondiau (trompette), Marine Horbaczewski (violoncelle) et Chris Joris (percussions), trônent également des artistes de la trempe de Wednlavi Zabsonré (batterie) - l’excellente découverte du Burkina Fasso - et d’Aly Keita, le balaphoniste camerounais de référence.
Le tout est accompagné par Nabindimbo, une chorale congolaise polyphonique dirigée par Bernadette, la maman de Marie Daulne (Zap mama). Ce groupe inédit viendra présenter son premier cd ‘Ode au peuple métisse’ (De Werf)


Blog « Musique.arabe »


Pour un autre récit ,voir Michel...















dimanche 20 novembre 2011

Il faut que les fenêtres soient ouvertes ou fermées…

Variation sur un proverbe…








Dis moi comment tu ouvres tes fenêtres, et je te dirai…qui tu es !


Par exemple il y a la fille aînée des voisins d’en face. Ils ne sont pas là, elle est seule à la maison. Elle a ouvert les petits volets d’une fenêtre du haut, sa chambre ?Ouverts, poussés , pas fixés, battront au vent s’il y en a…au rez- de- chaussée une seule fenêtre ouverte…mal ouverte d'ailleurs...

Quand c’est sa mère qui est là… : pas de volets ouverts en haut ou une seule fenêtre …moitié ouverte…?
Volets du séjour, grand ouverts. Pas ceux de la pièce du coin droit…le bureau de monsieur sans doute ?

Quand c’est son père, tout est ouvert, nickel, volets bien ouverts , fixés.!!!

La maison voisine, c'est celle de Robert. C'est un peu notre ami, assez souvent  il nous invite à aller l'écouter jouer de l'accordéon...Parfois les doigts de sa main droite refusent  le doigté , alors il secoue la tête d'un air désolé, et puis en change !!! Nous admirons sa jeunesse de 90 automnes et un peu plus.  Il ouvre bien régulièrement les fenêtres de sa très grande maison, où il vit maintenant tout seul. Le matin , nous sommes contents quand ces fenêtres s'ouvrent et guettons inquiets quand elles ne s'ouvrent pas. Parfois le soir, elles restent longtemps ouvertes, sans que s'allume la lumière de son salon. Mais on a tort de s'inquiéter, il est comme moi , il aime voir la nuit tomber...



Il y a encore la maison de ma sœur, notre maison d’enfance, que ma mère avait voulu pleine de lumière et donc de fenêtres, au sud sur la façade principale, à l’ouest pour le soleil du soir, à l’est pour celui du matin .
A la mort de mes parents, ma sœur a décidé de venir y vivre. Souvent elle m’étonnait. Je l’admirais, car alors qu’elle vivait seule, les soirs d’été, elle laissait tous les volets et fenêtres ouverts. Elle aimait voir le soir tomber et s’allumer les unes après les autres, les fenêtres des voisins dans la nuit. Leur présence l’accompagnait.
-Peur ? Non pourquoi ? De quoi aurais-je peur ?

Mais il y eut l’arrivée du Chat ! Et les fenêtres se fermèrent. S’il allait s’échapper, ce filou, ce « nâtre » ! Les fenêtres... Pas les volets, toutefois..

Puis le Chat s’habitua à la maison, ou ma sœur à sa présence, et elle lui laissa champ libre et fenêtres ouvertes, et l’on put à nouveau goûter le soleil du jour et le déclin de la lumière du soir.

Mais survinrent les rumeurs, de vols, d’agression, de jour, de nuit, propriétaires présents ou propriétaires absents… et se fermèrent fenêtres et volets, de jour, de nuit. Les fenêtres quand nous étions à la maison, les volets dès que nous sortions !

Il y a le cas de mon beau père ! Leur grande maison aux nombreuses portes-fenêtres à volets de bois. Tant qu’ils y vécurent avec ma belle mère la question de fenêtres occupa tous leurs débuts de soirées, lui les fermant dès sept heures l’été, et quatre heures l’hiver, « pour que ce soit fait » et elle récriminant, se plaignant de cet enferment prématuré et « pas normal » ! Le matin en revanche, dès six heures, été comme hiver, il ouvrait, « pour que ce soit fait » avec un soin systématique, toutes les pièces une à une, rabattant à grand bruit les volets contre la façade….Les voisins protestaient mais en vain … « Faut quand même bien qu’on les ouvre !!! »

Plus tard, obligé à la solitude, sa femme étant en maison de retraite, il put en toute liberté, « pour que ce soit fait » tout clore dès 4 heures l’après midi quelle que soit la saison…et tout déclore avant l’aube…



Et il y a nous…
Ce que j’aime depuis toujours, et avec obstination, c’est profiter de la lumière du jour jusqu'au dernier moment… en revanche, je vous l’avoue, peu me chaut d’assister à la naissance de l’aube et à l’arrivée de l’aurore « aux doigts de rose… »


Nous ne fermons donc que la nuit tombée…
Et encore que j’aime l’été voir la nuit, sentir les odeurs qui s’exhalent mieux une fois la nuit tombée, la glycine, le prunier, le chèvrefeuille, et le jasmin…
Michel demande avec un soupçon d’ironie : « Fait-il assez nuit, ou y a-t-il encore une lueur ? » » Dois-je te laisser ouverte la fenêtre de ton bureau, ou puis-je la fermer ? » Mais il se plie avec gentillesse et patience à cette exigence vitale (!!!) de lumière et d’été…


En contrepartie, c’est moi qui le matin ouvre les fenêtres dans un ordre bien établi qui me permet de m’éveiller et de constater fenêtre par fenêtre, la vie du jardin et celle du quartier...Et lui permet de descendre dans une maison ouverte au jour…

Mais voilà que, est ce la venue de l’hiver, ou un certain ramollissement de l’âge, voilà que ce serait presque moi ces jours-ci, qui, dépitée de voir la nuit tomber si tôt, si vite, si sombre, entreprends parfois de fermer les volets, de les refermer sur l’épaisseur du soir …

Pourtant autrefois j’aimais bien, plus jeune, arriver le matin dans la nuit et entrer dans le lycée tout bruissant des bruits des voix, de la chaleur des lumières ; j’aimais les soirs d’hiver, voir la ville s’éclairer, surtout aux approches de Noël, et, venant du crépuscule des rues, entrer dans les lumières dorées et chaudes des magasins …
Espérons, avec Noël peut-être ?

Comme quoi, je vous le dis,  la question des fenêtres, est une grande question métaphysique…



samedi 19 novembre 2011

HEU…reux !!!


Une journée de la Saint-Martin…

Ce matin -vers dix heures- il fait encore une douceur plus qu’automnale. Bien sûr, vers cinq heures , le soleil sera si oblique que pour peu que les nuages aient gaqné du terrain, on aura une impression de nuit qui tombe…C’était ainsi à Marrakech le bref passage à la nuit des beaux soirs d’hiver !
Mais ce matin, le soleil est brillant et l’air vif sans mièvrerie !
Je décide donc d’aller chercher notre pain à pied à la jolie boulangerie K…
En m’engageant avenue Péboué, une belle rue bordée de platanes des deux côtés, je découvre que les arbres se sont en un rien de temps dépouillés …
Peu importe, je marche sur un tapis musical qui craque au rythme de mes pas…
Je croise des gens qui disent bonjour, et ont l’air un peu pompette de l’air pétillant du matin.

Les deux serveuses boulangères sont jeunes, accortes, et souriantes .
-Comment allez-vous ? disent-elles à la jene femme qui me précède dans la file
-Bien, bien ! il fait si beau on est heureux , comment ne pas être heureux avec ce temps ?
Et toute la file d’approuver…

Et je médite sur le chemin du retour à cette espèce d’insouciance. Ou inconscience ? Je repense à la question récurrente de Michel : « Comment ça se fait ? c’est la Crise! et il y a foule dans les bistrots, les restaurants, au cinéma »

Il y a le long de la plage des promeneurs flânant tout au long des journées qu’elles soient chômées ou pas…
Sur la place Clémenceau de Pau, dont l’architecture contestable a au moins le mérite de permettre aux rares cafés qui se sont maintenus d’étendre leurs terrasses de plus en plus avant…dès qu’il fait soleil affluent des jeunes, des familles , des retraités…
Faut-il les avertir comme mon grand père Lexou que ça ne durera pas, hi ho !!! ni le soleil , ni l’insouciance, ne la douceur des choses .!

Je pense à C’est dans l’air !!! à LCI !!!! and tutti quanti…tété analyse, télé prédiction, télé ragots, télé catastrophe, télé guignol politique…
Je pense Crise, Réchauffement Climatique, Pénuries...d'eau, de carburant ...

Et puis je regarde cette femme, qui n’a pas l’air bien « bourge », et tous ces gens qui se promènent et qui s’amusent.Ou discutent musique ...

Evidement je sais bien que le XVIIIème siècle s’étourdit aussi tout entier , extrêmes riches et extrêmes pauvres, dans la fête et l’insouciance et que cela n’a pas très bien fini , je sais bien que la guerre elle-même a pu générer des oasis de divertissement…

Mais je me demande aussi si on est pas en train d’ apprendre un autre mode de vie qui « profite », du beau temps , des spectacles gratuits, qui mange au restaurant, et se prive dans son intérieur… « Circenses » et (un peu) de pain…et de soleil … !!!

Un autre mode de penser, plus individualiste, sans projet social, moins concerné par le devenir collectif, vivant la cassure sociale et s’en consolant en s’occupant des siens … ?



Cet après midi nous irons nous aussi nous balader dans la forêt du Bager pour profiter des derniers feuillages des hêtres, nous croiserons dans un bar bondé le retour de l’équipe de rugby locale et leur superbe chant « Hégoak », nous grimperons le col de Marie Blanque pour voir l’ombre envahir la vallée …




Et nous ne serons pas les seuls !!!




vendredi 11 novembre 2011

Tomi Ungerer, Allumette


Une « Allumette » selon mon cœur…




Enfant, je n’ai jamais beaucoup aimé la Petite fille aux allumettes. Le froid, le manque de lumière, la faim, le ciel vide.. trop de maux accumulés jusqu’au mal ultime, la mort….

Elle faisait partie de ces personnages féminins angoissants auxquels je refusais de m’attacher, de peur d’en souffrir.
La petite Sirène et son sacrifice d’amour aussi tragique qu’’inutile, Le petit Chaperon si mignonne et si mal protégée par sa mère, et surtout La petite Chèvre de monsieur Seguin,( ah, qu'elle était jolie pourtant !), si courageuse, si décidée à vivre et dont le père , pardon , le maître !, resta si absurdement sourd à ses appels…

Bref, avec l’opiniâtre optimisme qui était déjà le mien et qui le demeure malgré l’âge, sur le mode mineur il est vrai, j’ignorai froidement ces tragiques destins de filles,(!!!) (car le chasseur à point survenu, pour ouvrir le ventre du loup , bernique !) Je refusai catégoriquement de relire ces histoires et plus tard, je ne les racontai que le moins possible à mes enfants , y compris les enfants de mes classes…Pas de Petite sirène, pas de Petite chèvre, pas de Petit Chaperon …sauf nécessité scolaire absolue !



C’est donc avec ravissement que je découvris tardivement, en explorant pour mon travail les trésors de la littérature enfantine, Tomi Ungerer. Un prodigieux coup de crayon et une palette « expressionniste » saisissante. Une insolente irrévérence. Je fus séduite. Avec la légèreté qui "sied" à des livres pour enfants, il égratigne joyeusement l’ordre social, et n’épargne aucun représentant de l’ordre, de la bonne morale , de l’armée, du fric roi, de la bêtise bien pensante.
Et c’est au nom d’une autre morale, anti conventionnelle, généreuse et altruiste.

Mais , plus que tout,  ce que j’aime particulièrement chez lui c’est le formidable espoir qui se dégage de ses histoires, bien qu’elles n’édulcorent jamais malheurs, vexations, méchancetés, et mesquineries de la condition humaine .
Pour avoir traversé enfant les souffrances de la guerre, les déchirements de l’Alsace, et les malheurs du nazisme, il ne demeure pas moins fondamentalement optimiste, amoureux de la vie et du monde tel qu’il est ….
Alors bien sûr sa Zéralda, dont le père ne vaut pas mieux que le Père Seguin, qui l’envoie inconsidérément au marché par un chemin isolé, cette petite Zéralda nous fait un petit chaperon rouge bien attachant et énergique, qui apprivoise son Ogre, à coup de génie culinaire .Son affreux poulpe a nom Emile et grâce à ses dispositions physiques spéciales, fait carrière de sauveteur en mer. Ses Trois Brigands sont des Robins des bois bienfaisants aux enfants.
C’est que ces personnages souvent marginaux, sont dotés de la faculté d’évoluer, de se transformer au cours de leur histoire, de changer en déterminations positives leurs données initiales.

L’une des plus délicieuses est Allumette

Conforme au départ à celle d’Andersen, tonalités sombres, froid et pauvre lumière d’hiver, faim, misère, et méchants et mesquins à l’horizon…

Mais sa foi ( dont l’a dotée Tomi, à mon avis, grand Mécréant ) a une vigueur désespérée mais efficace, et obtient du ciel abondance de biens de tous ordres et de tous calibres, qu’elle gère par la distribution avec pragmatisme et bon sens : goût du bonheur, du partage, et refus de la misère, sont ses valeurs, comme pour nombre des personnages de Tomi….et reconnaissance envers le beau ciel d’orage qui lui a déversé ces biens hétéroclites et précieux .



Un joli conte de Noël que celui-là…

Merci à Tomi pour sa formidable force de bonheur…

jeudi 10 novembre 2011

Au temps des rédacs…

Des rédactions, c’est ce que nous faisions dans notre enfance, puis au collège.

C’est ce qu’on faisait encore quand je fus prof et puis formateur de prof…époque où la rédac devint « production d’écrit »…

Je ne débattrais pas de ce qu’impliquait sans doute ce changement de terminologie..

« Rédaction » gardera toujours pour moi un petit parfum d’enfance à la Colette, évoquera toujours des images de pages à écrire, de cahier Sieyès, de crayon à papier , et de stylo plume, des idées de choses à inventer ou à décrire, puis à brouillonner pour les « rédiger » ensuite, à recopier, à mettre en page…à rendre à son destinataire et juge, le prof !

Non ce qui me donne à réfléchir aujourd’hui que je consacre tant de temps persnnel à l’écriture, c’est la question de la contrainte …

Bien sûr, c’est un vieux débat : si écrire comme parler est un prolongement de la vie comme le dit Célestin Freinet , l’écriture doit être libre , choisie quant au temps qu’on y consacre, le moment qu’on choisit, et le sujet qu’on se donne…
Et si j’ai toujours considéré comme une intuition géniale, l’ idée de Freinet de faire imprimer leurs textes par les élèves pour les publier dans un journal, j’ai toujours eu la plus grande réticence à l’égard du « texte libre».
Je connaissais trop d’enfants que paralysait l’absence de sujet et d’autres (dont j’étais bien sûr) que l’absence d’échéance imposée conduisait à l’absence de texte tout court…Libre pour libre, ça veut dire libre !!!
Alors , bien sûr,d'une part  jeune prof, je ménageais une boîte à textes effectivement libres, ou des séances de lecture libre de créations personnelles, qui d’ailleurs me créèrent en classe, à l’âge de l’adolescence, des moments délicats dont je dus me tirer plus ou moins élégamment, soit par la diplomatie, soit par une « censure » qui ne s’avouait pas comme telle…

….Et j’organisai d'autre part, comme tout le monde, et comme le préconisaient les instructions officielles, des sujets et des temps de « rédaction »

Bref je me disais qu’après tout Willie enfermait Colette pour qu’elle écrive et que sinon…
J’essayais donc de rendre « productives » les contraintes ; réflexion sur les textes lus pour écrire à la manière de.., inventions, discussions et aménagements sur les sujets de rédaction, trésor d’idées collectées et dotées de copyright …

Et pour mon propre jardin d’écriture, pendant mes années d’étude, je m’enfermais donc moi-même dans les délicieuses contraintes du sujet à traiter, mais à traiter à ma manière, tout en restant dedans.
Quant à l’échéance à respecter, pour moi ce fut toujours difficile …mais productif ?Je réfléchissais et tournais mes idées dans ma tête très longtemps, trop longtemps avant de prendre la plume…, puis les reprenant, complétant, rechangeant, je finissais au dernier moment toujours, ce qui donnait à ma production une sorte de tension, d’achèvement in extremis, qui n’était pas sans angoisse et non plus sans charme…



Mais je fais maintenant l’expérience assez délicieuse de l’écriture sans contrainte .
Pas d’échéance ! Ni de sujet d’ailleurs. Parfois c’est un peu angoissant, il me semble que je n’ai plus rien à écrire, rien à raconter, et pour peu que je ne vois pas de lecteurs signalés sur le compteur du blog, j’ai le vide en tête…
Et puis viennent des idées , quelquefois plein d’idées , des titres se bousculent, je suis débordée, je les note sur un vulgaire bloc Sténo. Beaucoup resteront à l’état de titres.

Puis je finis par me décider à commencer !!!
Et là aucune échéance à respecter, je peux (Merveille du traitement de texte) polir, rapetasser, déplacer, couper, coller, changer de mot, de structure…enregistrer jusqu’ à demain, reprendre encore et encore .


Un vrai délice...
C’est un plaisir d’écriture pur, sans projet de production ciblée.

Quoique, bien sûr, demeurent inconsciemment à l’arrière plan de ma pensée des lecteurs qui pour être fondamentalement « virtuels » n’en sont pas moins réels et même parfois existants . J’écris un peu pour eux mais beaucoup pour moi, pour écrire, pour le plaisir de « boutiquer » des mots, de créer des phrases qui me plaisent, d’exprimer des émotions, mes idées de Madame Cyclopède …(ainsi m’appelaient mes très grands élèves !!!)

De l’écriture pure…

Mais parfois je me demande si cette écriture nonchalante ne se trouverait pas améliorée par quelques contraintes. Un projet de production finalisée n’aurait-il pas plus de force ? Certes chez Rousseau, ce que j’ai toujours préféré ce sont les Rêveries du promeneur solitaire qui pour ne s’adresser qu’à lui-même m’a toujours beaucoup plus concernée que La Nouvelle Héloïse ou les Confessions …mais… ?

A l’inverse, je me demande aussi comment l’école pourrait aménager à côté des situations contraintes ce type d’écriture sans échéance ni hors sujet. Le traitement de texte, on l’a…mais l’a-t-on vraiment ? Et sans contrainte obtiendrait-on ces relectures, reprises, modifications, polissages…. ?

Si souvent nous l’avons tenté….

Alors je vais faire une réponse de madame Cyclopède :
« Cela dépend : on peut le tenter, on peut aussi ne pas le tenter…. »