vendredi 8 juin 2012

Bruno Maurice et Jacques Di Donato, Anches multiples, Anches libres…



Au Pont Tournant le 16 mai
Ce fut pour nous une, grande soirée.
Bruno, nous ne l’avions pas entendu en direct depuis longtemps, son jeu est toujours, ou de plus en plus, magique et me laisse sans mots…
Quant à Jacques di Donato, son nom et sa musique sont associés pour nous à Marc Péronne, auquel il donne une réplique digne des chansons mélodiques  de Marc..et nous l’avons souvent écouté..
 Mais en live jamais!
Et c’est la découverte d’un son extraordinaire, de pureté, de virtuosité, d’élégance et d’un humour façon saltimbanque italien : légèreté, détachement, gravité, émotion.


Et les deux ensemble, nous offrent une expérience excitante , l’exploration, la recherche libre  , des possibles sonores de leurs instruments.
Est-elle free leur musique ?
Libre en tout cas, elle  l’est,  qui cherche à  explorer des harmonies inaccoutumées, tente de trouver de nouveaux sons, une  vibration nouvelle de l’air dans  l’anche unique de la clarinette et des 1500 anches de l’accordéon !!!
« Libre et improvisée sur de la musique écrite »!!!

Et « Contemporaine » aussi ?
Les œuvres le sont : Oblivion et Maria de Buenos Aires, Otoño   de Piazzolla,  Improvisation, Mitango de Bruno Maurice, comme Nuages, Lever de Soleil, Embruns, Arabesque de Jacques di Donato, valse Dombelle de Marc Perrone , dans un medley de valses connues …
Mais peut-on dire qu’elles sont de la « musique  contemporaine » ?
Je ne sais pas bien ce qu’est la musique contemporaine je dirais simplement, par référence à la peinture contemporaine,  que nous sommes  amenés à voir,  que si elle est contemporaine, leur musique  n’est  jamais « conceptuelle »
« Mitango » (Bruno Maurice ) est certes créé à partir d' un jeu formel sur la note mi…mais c’est aussi un cri de l’âme , un tumulte de l’émotion où vient se manifester le  thème déchirant de la séparation ,avant  la douceur mélodieuse de l’apaisement .
Nuages (Bruno Maurice) suggère  une correspondance délicieuse et parfois malicieuse entre  montée progressive de la  perturbation atmosphérique et perturbation de l’air dans l’anche de la clarinette, insolite des sons, qui éclatent en  bruits comme des bulles, avant que le souffle puissant de l’accordéon ne les balaye et s’impose.
Le vent soulève des Embruns de la mer, cette brume froide et iodée, qui nous frappe au visage, et nous saisit de l’amour de l’océan qui « console nos labeurs »
Lever de soleil musique la  vibration rose du soleil oblique qui monte peu à peu dans le ciel…
Quant à Piazzola , que nous aimons toujours,  nous le retrouvons à la fois familier et transfiguré par la transcription pour les  deux instruments, mélancolie envoûtante de l’oubli, de l’automne , de Buenos Aires .

J’ai pensé alors au free jazz,  ou à l’art contemporain, plastique et poétique, ou à certains œuvres musicales que je tente parfois de connaître. J’ y sens bien une recherche qui me semble importante dans l’évolution musicale, d’une exploration des possibles du son instrumental,   et  d’harmonies nouvelles, ou cherchées dans les marges et aux limites des harmonies qui nous sont familières…
Mais souvent ces limites  se heurtent à mes propres limites, quand j’en perds le sens, l’émotion, le sentiment d’une plénitude esthétique qui s’impose à la sensibilité et à l’esprit. J’y perds le sentiment  que l’œuvre existe, avec une sorte d’évidence et de beauté…
C’est alors que je renonce, lâchement …et je dis, 
« Trop cérébral, trop conceptuel, rien que conceptuel » … 
« Aboli bibelot d’inanité sonore »,
«… vide pour moi,  mon intuition, ma compréhension, ma sensibilité… »
Recherche savante pour les seuls savants, et qui nous laisse au bord du chemin…

Mais ce soir du 16 mai, je l’affirme,  ce n’est pas ce free- là, ce n’est pas ce conceptuel –là qui anime les anches de la clarinette de Jacques Di Donato et du appassionata de Bruno !
Chaque œuvre jouée est chargée de sens, d’évidence esthétique et émotionnelle !
Toujours au bout de l’exploration, du tumulte (quasi onomatopée chez les Romains qui désigne le bruit complexe et rythmé du branle bas de combat), de la dislocation, de la découverte d’une dissonance troublante, il y a la mélodie puissante, harmonieuse, déchirante ou triomphante, qui se recompose pour un chant d’émotion…
Bruno et Jacques ne nous oublient pas. Leur  liberté musicale, ils la partagent avec nous…

Je suis tout heureuse en me disant que grâce à eux, libération, improvisation, modernité peuvent signifier  pour moi bonheur d’écouter et de ressentir !!!
Jugez-en plutôt!!!







1 commentaire:

sister for ever a dit…

Musique expérimentale... expérience un peu difficile pour moi je dois dire... même si les trois dernières minutes me sont plus proches («accessibles», dirait mon jeune frère!)