mardi 3 mars 2015

DALTIN TRIO à Toulouse.... d'une soirée à l'autre....




"ALCHIMIE"....

A Toulouse, Espace Croix- Baragnon, il y a une salle dont le  joli nom, La Salle Bleue, a des airs de jazz et de Note bleue…
Il y est habituel   ou en tout cas fréquent, que les concerts s’y programment pour deux soirées successives.
Et souvent nous en profitons pour redoubler le plaisir de ces concerts. Car le même concert n’est jamais tout à fait le même, ni tout à fait autre…et le redoublement offre  à la fois le plaisir de l’attente et celui de la  différence …

Jeudi et vendredi soir y était programmé Gregory Daltin trio…

Nous connaissons un peu ce trio, l’ayant écouté à plusieurs reprises à Toulouse et à Tulle , et nous assistons à son évolution qui ne résulte pas seulement des différences de contexte…
Et plus encore que d’habitude  nous avons profité de cette double écoute à la Salle Bleue pour  raison de différence remarquable :
Le premier soir nous étions heureux de retrouver le jeu connu et chaleureusement imbriqué de l’accordéon de Gregory Daltin, de la contrebasse de Julien Duthu et des percussions de Sébastien Gisbert.

Plaisirs …
Retrouver le son de Grégory Daltin, nuances et légèreté de sa virtuosité, variété de sa maîtrise à passer de l’accordéon au bandonéon, classique pour le tango, et joliment surprenant sur le reggae, ou à l’accordina, pour un fil mélodique délicat…
Retrouver la contrebasse de Julien Duthu, qui offre avec profondeur la  couleur riche et sombre sur laquelle se détache l’accordéon , ou parfois esquisse, toujours dans le grave, la ligne mélodique du thème…
Retrouver les percussions de Sébastien Gisbert, la richesse et la variété des instruments, des nuances interprétatives, des colorations  choisies pour les thèmes, une grande virtuosité complexe mais sans  esbroufe …
Quant aux thèmes , pour certains que l’on aimait, c’était le plaisir d’en écouter  une interprétaion nouvelle , par exemple en ce qui me concerne,  Beija flor que j’adore, mais encore , Rimes  de Nougaro et Aldo Romano, ou   Historia de un Amor. Pour d’autres c’était la redécouverte, la Valse de Gregory Daltin, la fantaisie du Tango de l’autruche ou Le temps s’arrête de Julien Duthu que j’aime encore plus, le  Reggae de Sebastien Gisbert,  ou des découvertes,  reprise inspirée de  Alfonsina del mar , et  de belles créations de Grégory  et dont je ne me rappelle pas le nom…

Bref une soirée pleine de  plaisirs musicaux délicats et agréables …

Mais , Il me semblait que ces beaux moments mélodieux  trop courts, étaient comme les pièces d’un puzzle  qui ne s’ajustaient pas et je ne retrouvais pas l’unité de l’ensemble, le fil conducteur de cette « Alchimie »
Evidemment je n’ai pas de vraie culture jazz, évidemment je suis à jamais esclave de la mélodie « qui chante », j’aime  quand elle se perd, éclate un moment librement, mais il faut que je la retrouve, j’ai besoin comme en littératrure, que la structure d’ensemble de l’œuvre me soit perceptible , que la construction des interventions des musiciens fasse apparaître , disparaitre , et réapparaitre le thème conducteur… trop libre pour moi , trop « free », c’est « gratuit » ! beau certes,d’une certaine manière, mais sans émotion…
Bref, j’attribuais à ma perception personnelle un certain manque d’émotion…

Et puis les jours se suivent…
Le lendemain, dès le premier thème,  le magique Beija flor, nous avons compris que ce concert , le même, serait pourtant différent.
Etait-ce notre changement d’angle, nous avions changé de côté, les trois musiciens  nous sont d’emblée apparus comme étroitement solidaires, dans des compositions où la musique circulait de l’un à l’autre,  et s’épanouissait en des chorus qui participaient étroitement à l’économie d’ensemble…
En fait ce sont eux, les musiciens, qui s’étaient placés différemment et construisaient différemment de l’un à l’autre, avec Gregory  comme centre, une vraie communication musicale…ET circulait entre eux et avec nous, une énergie dont chaque œuvre retirait force et émotion…
Bref ils avaient retravaillé, repensé leur «  alchimie » et elle fonctionnait remarquablement…

Je suis incapable, vu mon savoir en musique et en composition musicale de dire comment et pourquoi, mais cette fois il y  eut les thèmes aimés ou découverts, les sons appréciés, les interventions entrelacées … ET  l’émotion fut  au rendez vous…
 Pour mémoire , le beau prologue de Grégory au bandonéon, remarquable , où la mélodie avance comme cachée dans les fils précieux et multiples d’une impro ,  puis peu à peu se révèle avec l’entrée des deux autres instruments « ,une historia de un amor »,  ce moment  me paraît  symboliser la charge émotionnelle  de toute la  soirée …


 Comme quoi, « redoubler »  un concert, pratique qui souvent amuse, intrigue, et étonne les amis et…les  billetteries( !), est une expérience souvent pleine de richesse, et dans le cas de ces deux soirées, spectaculaire…

Une  de nos amies musiciennes m’a dit un jour : « encore, encore ,vous allez écouter R…. ? Vous n’avez pas peur de l’user ? »
Et non, il en est de certaines œuvres, comme de certains livres ou poèmes de notre vie, on n’en  épuise jamais la teneur .
Pour certaines , c’est  la multiplicité des écoutes qui est nécessaire pour  en ouvrir l’accès ….

C’est aussi  un des grands plaisirs de suivre certains musiciens  et certains groupes  dans leur cheminement de musique, comme certains auteurs dans la création de leurs livres…

Bienfaisants ceux qui ne nous lassent pas…




Aucun commentaire: