jeudi 28 janvier 2016

Cierra tus ojos , le concert de Daniel Mille à Cenon, un CHEF D'OEUVRE!


Tous les concerts auxquels nous assistons,  choisis, programmés,  attendus , mérités parfois, par une longue route, un hôtel plus  sommaire , un repas médiocre, une fatigue qui ne s’allège guère avec les années !!tous ont leur séduction propre et non comparable …
Au partage intense et éphémère de la musique qui nous a amenés jusque là se mêlent parfois des éléments de contexte uniques et  non prévus  , un paysage entrevu, une baie entre les pins,   un repas insolite et délicieux , ,…un brindis aussi merveilleux qu’ inattendu, la rencontre précieuse du Musicien d’Election, pour assister à la musique duquel  nous avons  fait le chemin, Quelquefois  la découverte grâce à lui d’une amie ou d’un interprète qu’on ne connaissait pas  et qui enrichira pour  toujours nos écoutes musicales , Emile Parisien, François Salque , isabelle olivier, Sébastien Surel, Dorsaf Hamdami et Myeko Myasaki, Airelle Besson, Michel Massot…Martine C.et tant d’autres …parce que les musiciens que nous aimons, et parce que nous les aimons, sont pour nous  des passeurs de musique ….
Mais seul un petit nombre de  concerts  nous marquent durablement par  la conjonction remarquable d’éléments qui en font des « chef d’œuvre ... » un moment parfait ….
Ainsi certains jours de mer, certains jours de feria, certains jours de neige jadis  nous offrent-ils  cette conjonction rare et parfaite de leurs éléments.

Ce fut le cas du concert de Daniel Mille




Oui ! nous l’avions écoutée des fois et des fois…mais si nous en connaissions tous les morceaux,  en en vivant la réalisation, peu importaient les titres que d’ailleurs Daniel Mille ne donnait pas , elle se déroulait comme une œuvre  totale dont les parties s’imbriquaient  complètement pour atteindre l’évidence de la présence …
Dans cette salle qui d’emblée n’avait rien de remarquable,  dès leur entrée, le cercle des  cinq musiciens  dans un halo chaleureux de lumière semblait un cercle intimement soudé de talents accordés, sous la présence simple et remarquablement prégnante de Daniel Mille. Tout semblait justement prévu et à la place même où il devait l’être, pour participer de l’ensemble,  leurs graves pour la nostalgie sombre  d’Astor Piazzolla  et la toujours délicieuse-« soyeuse »-  mélancolie de Daniel, leurs sonorités toujours différentes et belles jouant dans tous les registres de leurs instruments, la juste distribution de leurs dialogues  avec l’accordéon…le plaisir de jouer et de partager …
Tout me semblait pertinent, adapté à ce moment, les violoncelles pour Piazzolla, le titre du concert, le style unique de Daniel Mille  ce « phrasé » (je ne sais si on dit ainsi en musique !!!) poétique ,  particulier, cette douceur du tempo …
En revanche je l’avoue Yo no cerré mis ojos, je regardais de tous mes yeux, mes mirettes de « non musicienne », repérais qui jouait instant par instant


 pour saisir visuellement les différents plans entendus,   car malgré  les écoutes réitérées des cd  , je ne sais pas à l’écoute quel violoncelle joue, et le voir de tous mes yeux, associer à sa sonorité les visages de Grégoire Korniluk, ou de Paul Colomb ou  Michel Deville, tendus ou souriants,attentifs toujours, et le face à face superbe de Diego Humbert et Daniel Mille, ajoute au plaisir fort de l’émotion , l’impression d’un supplément de savoir dans l’écoute…et le sentiment de voir se construire en live l’œuvre sonore…


 Ce fut bien sûr trop court mais peut-être moins frustrant que parfois,  tant l’impression d’un objet parfaitement accompli fut forte ….

Et si on me demande pourquoi…
Quand il s’agit de dire et d’écrire pourquoi on l’aime, on a du mal à trouver les mots .Peut-être ferait-on mieux de se laisser aller au fil du courant et de dire …

Parce que c’est Piazzolla !  parce que c’est Daniel Mille !
Parce que ce Piazzolla n’est «  ni tout à fait le même ni tout à fait un  autre » .


Parce que Daniel Mille est toujours Daniel Mille…


mardi 5 janvier 2016

La mort d’une mère



Ce n’était pas mère …
Ce n’était que ma belle –mère …
Mais toutes deux nous nous étions beaucoup aimées au temps de notre première rencontre …
Son côté femme enfant petite , ronde ,jeune , à la peau lumineuse , sa voix trop forte , ses rires , son affection possessive , et tendre, sa détermination à être une belle mère « pas comme les autres » , ou plutôt « comme la belle-mère de E….(je ne sais plus qui !) que  sa belle fille aimait tant », m’avait comme enchantée, au point même d’avoir un peu terni parfois  l’image  de ma maman , que j’aimais,  et j’aime encore d’un inconditionnel amour .
Et puis avec les années, la venue de l’âge , l’altération de sa santé , qu’elle ne supportait guère , et qui la rendait amère , avec peut-être  mon propre devenir d’adulte et de mère, cette relation, s’était attiédie , peut-être,  et finalement assombrie pour ma part ces dernières années avec le sentiment de mon impuissance à agir pour soulager ses tourments de santé, son refus de les accepter, sa rancœur désespérée,  son permanent reproche à notre égard de ne pas répondre à sa détresse….et finalement son repli  dans un monde imaginé et délirant où  seul entrait son fils et où je n’entrais plus …
Quand je l’ai revue  ce matin du 2 janvier , si menue, si petite dans son lit de morte , avec son visage calme et immobile à jamais,  presque sans rides , mais si émacié qu’il semblait le profil d’un petit oiseau, j’ai eu peine à la reconnaître…
Je me suis approchée d’elle pour un dernier adieu et ce faisant en tournant autour de son lit, tout à coup, mes yeux ont trouvé son autre profil , et je ne sais pourquoi , alors je l’ai reconnue…j’ai reconnue la jeune femme d’autrefois , et toutes les images du passé heureux  m’ont frappée au visage , et avec le souvenir,   le chagrin... de la perte de l’affection d’autrefois, et de l’affection tout court …et peut-être de l’affection manquée…


Plus tard nous sommes partis pour les démarches que chacun connait et  malgré le poids terrible que l’accompagner toutes ces années a fait peser sur Michel, malgré la pénible quasi absence de communication de ces mêmes années , ce n’est pas un soulagement que j’ai éprouvé  mais une sorte de sentiment de solitude…